Derrière les motifs architecturaux de ces ponts tout en courbes se cache un béton bien spécial. Les ponts Darwin sont les premiers ponts au monde en béton avec poudre de verre. En effet, 10 % du liant ternaire a été remplacé par du verre recyclé finement broyé.
C’est environ 40 000 kg de ciment qui seront économisés et environ 40 000 kg de verre recyclé qui seront valorisés au total sur ce projet (soit l’équivalent de 70 000 bouteilles de vin). L’utilisation de la poudre de verre comme ajout cimentaire a permis de réduire la quantité de CO2 émise dans l’atmosphère de 40 tonnes. Cela représente la quantité de CO2 produite par une voiture parcourant environ 200 000 km. Les ponts Darwin ont été conçus par les ingénieurs de ponts en collaboration avec les ingénieurs du laboratoire de la Ville de Montréal.
Le béton utilisé est l’équivalent d’un béton V-S de la norme 3101 du MTQ. Afin de réduire la fissuration du béton à jeune âge, un décoffrage hâtif à 7 MPa (basé sur la maturométrie) a été effectué sur certains éléments des ponts afin de débuter une cure à l’eau qui est essentielle à la performance du compensateur de retrait ajouté au mélange (6 % du poids du liant). Pour les éléments des ponts qui n’étaient structuralement pas possible de décoffrer hâtivement, un compensateur de retrait (4 % du poids du liant) combiné à un réducteur de retrait (2 % du poids du liant) ont été utilisés. Dans tous les éléments des ponts, des fibres synthétiques ont été ajoutées (2,3 kg/m3).
Dans l’objectif de contrôler le gain de température du béton, la température de ce dernier à l’état frais a été déterminée à l’aide d’une boîte semi-adiabatique et le bétonnage a été effectué de nuit. Pour des considérations architecturales, plusieurs tests ont été réalisés afin de développer un béton le plus blanc possible. Le mélange retenu est constitué de granulats exempts de minéraux colorés et d’un ciment hydraulique composé incorporant du laitier et de la fumée de silice (GUb-S/SF). La poudre de verre a également contribué à blanchir le béton. Le choix de l’anti-graffiti s’est fait à la suite d'essais de performance réalisés par la Ville de Montréal.
L’entrepreneur a relevé le défi audacieux de fabriquer les coffrages courbés et des motifs architecturaux arrondis. Des murs de soutènement à géométrie complexe en béton préfabriqué sont prévus entre les ponts afin de créer des paliers de plantation végétalisés. La totalité des éléments des ponts (à l’exception des semelles) est armée de barre en acier inoxydable (S32304) afin de prolonger considérablement la durée de vie de l’ouvrage; une première au Québec. La durée de vie nominale des ponts est de 125 ans principalement dû à ces barres. Par conséquent, le coût du cycle de vie ainsi que l’empreinte environnementale seront réduits.
La poudre de verre comme ajout cimentaire permet notamment d’augmenter la durabilité et la résistance du béton ainsi que de réduire sa facture environnementale. Le recyclage du verre est un enjeu d’actualité au Québec et ailleurs dans le monde. Une partie importante finit malheureusement dans les sites d’enfouissement. Par conséquent, l’utilisation de la poudre de verre dans le béton est une façon de valoriser cette matière.
Ce projet est réalisé dans le cadre de la Chaire SAQ de valorisation du verre dans les matériaux de l’Université de Sherbrooke. Mentionnons que la Ville de Montréal a déjà construit plus de 35 km de trottoir avec poudre de verre depuis 2011 et ils performent très bien. Ce projet pilote sera instrumenté pendant 1 an et suivi de près par l’Université de Sherbrooke et la Ville de Montréal pendant les 10 prochaines années.